Est-ce parce qu’ils ont des points en commun que l’animal est le meilleur ami de l’homme ?... La Science prouve en tout cas que, égaux devant la maladie, ils partagent les mêmes cancers, et bien souvent les mêmes traitements du cancer !

Explications et conseils du docteur Mélissa Pottier, vétérinaire chez Oncovet (59650, Villeneuve d’Ascq). L’un des seuls Centres dédié à la Cancérologie vétérinaire en France.

Quand un animal arrive chez Oncovet, le cancer est-il déjà dépisté ?

MP : Régulièrement, les vétérinaires traitants ont déjà fait les premières étapes de diagnostic. Par exemple une petite tumeur cutanée, des boules qui se voient de l’extérieur qui ont amené le propriétaire de l’animal à consulter. Souvent dans ce genre de cas, le vétérinaire a déjà enlevé une partie du cancer, l’a envoyé en analyse et nous réfère le patient avec les résultats de l’analyse histologique et le diagnostic du cancer. Il arrive parfois que les propriétaires inquiets s’adressent directement à nous pour un diagnostic complet parce que leur animal maigrit, n’est pas bien, est moins en forme…

Soigner le cancer du chien et du chat : quels sont les traitements qui existent ?

MP : Ils sont assez nombreux. En général, le traitement du cancer passe assez fréquemment par une chirurgie. Quand c’est envisageable, c’est idéal. Moins il existe de tumeur résiduelle, mieux ce sera pour les traitements qui peuvent suivre… L’analyse permettra de vérifier la nature de la tumeur, son grade, son agressivité... Ensuite, si c’est nécessaire, on a accès à plusieurs types de traitements adjuvants. Notamment la chimiothérapie, qui fait souvent peur au propriétaire mais qui, en réalité, est vraiment beaucoup mieux tolérée chez les animaux que chez l’Homme. On n’est pas au même dosage, on n’a pas les mêmes enjeux. On n’essaie pas de gagner 30 ans, on essaie d’en gagner trois ou quatre : la longévité d’un animal n’est pas celle de l’Homme. Et surtout, on essaie de les gagner dans de bonnes conditions pour lui : c’est notre objectif principal !

Il y a aussi les traitements de radiothérapie : ce sont des rayons plus locaux. La chimiothérapie est un traitement général pour prévenir ou traiter les métastases. La radiothérapie est un traitement locorégional de la tumeur pour éviter les récidives locales. Parfois, on peut associer les deux traitements avec la chirurgie.

Donc chirurgie, chimio et radiothérapie sont les bases principales d'un traitement du cancer ?

MP : Oui. Après, il y a différents types de radiothérapie, c’est un peu plus complexe, comme la curiethérapie… Mais globalement ça rentre dans la radiothérapie.

Pourquoi privilégier tel ou tel traitement ?

MP : Encore une fois, ce sera en fonction du type de tumeur et du bilan d’extension initial. S’il y a déjà des métastases, si c’est déjà étendu, si on peut ou pas opérer… Il y a des tumeurs qui sont très radio-sensibles ou qui sont peu chimio-sensibles. Certaines réagissent très bien et d’autres moins. Cependant dès qu’on peut passer par la chirurgie, il faut le faire parce qu’il y aura moins de cellules tumorales et les traitements secondaires seront plus efficaces. Parfois le diagnostic ne l’autorise pas. Parce que la tumeur est mal localisée, trop étendue, ou est située sur un organe que l’on ne peut pas enlever. D’où les différentes options de traitement. On tient compte aussi de la motivation et des contraintes des propriétaires (financières, disponibilité, éloignement). Les limites sont vraiment individuelles. Notre rôle est de proposer la meilleure stratégie thérapeutique. L’idéal pour la tumeur, l’idéal pour le chien. Ensuite, c’est le choix du propriétaire bien sûr.

clinique vétérinaire

Quelle est la durée d'un traitement du cancer ?

MP : Très variable ! Il y a des cancers pour lesquels on est en chirurgie, on fait quelques séances de radiothérapie et puis ensuite ce n’est que du suivi. Suivi assez long : on voit les animaux souvent pendant deux ans régulièrement pour vérifier qu’il n’y ait pas de récidive, que tout se passe bien sur les sites de la tumeur opérée ou à distance (absence de métastase). Parfois, le traitement du cancer dure 1 mois et on n’en parle plus… Parfois, dans le cas du lymphome par exemple, on part sur un suivi quasiment à vie. On sait que ce sont des tumeurs dont on ne se débarrasse pas vraiment, qu’on les met en rémission et que les chiens sont très bien, par contre il faut un suivi de chimiothérapie lors de rechute.

Qu’en est-il de la gestion du traitement au quotidien, pendant et après ?

MP : Le « pendant » est le plus compliqué à cause des allers-retours : les conduites, voilà la contrainte principale. Pour la chimiothérapie par exemple, il faut que les animaux dorment une nuit en hospitalisation... À côté de ça, il n’y a pas grand-chose à faire à la maison, à part des petits comprimés à donner en complément et en général, chien comme chat, ça se passe plutôt bien.

Y a-t-il des effets indésirables à gérer ?

MP : En radiothérapie, il n’y a pas grand-chose. Il n’y a pas de rayons résiduels, les rayons ne sont là que pendant les traitements. En chimiothérapie conventionnelle, on garde justement les animaux pendant 24 heures en prévention pour récolter les urines, par exemple. De l’information est ensuite donnée au propriétaire pour le retour à la maison afin qu’il n’y ait pas de danger. De même avec la chimio que l’on appelle métronomique (des comprimés à donner à la maison) : si le chien vomit ou fait ses besoins, il faut ramasser avec des gants, nettoyer avec de la javel…

On essaie de prévenir certains effets indésirables avant qu’ils ne se produisent. En chimio, chez le chien comme chez le chat, des signes digestifs peuvent éventuellement se manifester dans les jours suivant la séance (souvent limités à une baisse d’appétit). Si l’animal est sensible, on applique d’office un traitement anti- diarrhéique ou anti-vomitif en même temps que la séance de chimiothérapie, et la fois suivante, ça se passe très bien.

Finalement, ce sont les mêmes effets que chez l’homme !

MP : Oui, sauf qu’il n’y a pas du tout les effets psychologiques. L’animal peut ressentir un petit stress lorsqu’il est amené ici : c’est sûr, il n’est pas comme à la maison, il y a une nuit d’hospitalisation… Dans 90 % des cas, ça se passe super bien, les chiens s’habituent très vite à nous, et dès qu’ils rentrent chez eux, c’est oublié ! Il n’y a pas l’appréhension de la maladie. C’est plus difficile souvent pour les propriétaires que pour l’animal ! Et si un chien ou un chat est très angoissé, on essaie de s’adapter pour le voir. Soit un peu moins souvent, soit en minimisant les contacts en le traitant sous sédation, mais c’est vraiment très rare.

Y a-t-il des animaux qui sont intolérants au traitement du cancer ?

MP : Il y a quelques races de chiens pour lesquelles il y a des mutations génétiques, qui nous interdisent certains types de chimiothérapie. C’est assez rare mais on le sait d’avance. Quand ils arrivent, et qu’on voit qu’ils ont un cancer, on fait ce test génétique. Les Colley ou les Bergers Australiens par exemple : soit les résultats du test sont positifs et on change le protocole, soit il n’y a pas de mutation et ce n’est pas un problème. À côté de cela, les spécificités des chats sont bien connues. Il y en a qui ne supportent pas certains traitements.

Les traitements comportent-ils des risques pour l’animal ?

MP : Cela dépend un peu des traitements. On ne part jamais sur un « risque zéro » qui n’existe pas. Mais globalement sur des traitements qui ont une balance bénéfice / risque très positive.

 femme veterinaire

Dernière chose importante pour les propriétaires : le coût d'un traitement du cancer ?

MP : Il est variable selon le choix des traitements et leur intensité. Au tout début, dès qu’on a le résultat des analyses, qu’on sait qu’il va falloir conseiller tel ou tel type de traitement, on présente un devis au propriétaire avec différentes options allant d’un traitement du cancer optimal à un traitement du cancer plus palliatif. En fonction de ce qui est envisageable pour eux, on adapte. Pour les tumeurs, entre guillemets, où il n’y a qu’une modalité thérapeutique (chirurgie ou radiothérapie), les coûts sont forcément moins élevés qu’en additionnant chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie, ce qui arrive de temps en temps… C’est vrai que ça peut aller jusqu’à quelques milliers d’euros sur quelques mois quand c’est nécessaire ! On est conscient que ce n’est pas un point très facile.

C’est là que les études que propose OCR peuvent aider au financement ?

MP : Bien sûr ! L’intérêt des études cliniques c’est de rendre accessible des traitements de pointe et, grâce à cela, de soigner les animaux. Tout cela à moindre frais, voire à zéro frais pour les propriétaires.

Études cliniques veut bien dire qu’on propose à l’animal et à son propriétaire des soins qui sont déjà expérimentés et déjà validés ?

MP : Tout à fait et même parfois, des soins qui ont déjà été approuvés chez l’Homme, de façon régulière, et qui ont juste besoin d’une accréditation chez le chien. Et donc, il faut des patients chiens ou chats souffrant spontanément de maladie pour montrer le bénéfice de ces traitements et pour justement ne pas utiliser des « animaux d’expérience ». Ces études sont très encadrées et surveillées : c’est là que l’on peut accompagner aussi les propriétaires. Ça peut être mal visualisé alors qu’en réalité, c’est une chance pour les animaux et pour les propriétaires. Cela leur permet véritablement d’accéder à un traitement du cancer de pointe.

Pour conclure, c’est à y réfléchir quand on accueille un chiot. Il faut savoir que les mutuelles remboursent beaucoup de choses dans le cadre des cancers. Le propriétaire est beaucoup plus tranquillisé, et on le comprend.

Originaire de Lille, le docteur vétérinaire Mélissa Pottier est diplômée de l’Université de Liège. Elle a un exercice exclusif en chirurgie spécialisée chez Oncovet, avec une expérience de plus de 8 ans dans cette discipline.

Propos recueillis par L. Caron-Verschave

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    JULIA B Au mois d'août 2017, Indiana (ma chienne Cane Corso) a développé des lymphomes. Depuis fin août, elle est traitée par chimiothérapie. Le traitement est très bien supporté, il faut simplement surveiller constamment son poids pour qu'elle ne grossisse pas à cause de la cortisone qu'elle prend (comme pour les humains).