Vous voyez un chat qui circule régulièrement autour de chez vous et vous souhaitez savoir si vous pouvez l'apprivoiser ?
Demandons à Gwendoline LE PEUTREC-REDON, experte chez Vox Animae, de répondre à cette question : peut-on réellement apprivoiser un chat sauvage ?
Un chat sauvage, peut-on l'apprivoiser ?
Un joli minet déambule depuis quelques temps dans votre jardin et se prélasse au soleil, il vous observe de loin et se laisse parfois caresser. Vous vous prenez d’affection et vous vous demandez s’il serait possible d’adopter ce chat et de lui offrir le confort de votre demeure par ce temps hivernal qui se profile ? Gwendoline LE PEUTREC-REDON, comportementaliste spécialiste des relations Homme-Chat, nous donne quelques pistes pour savoir si ce choix est judicieux.
Doit-on recueillir un chat abandonné ? Réflexes et obligations
Qu’entend-t-on par chat sauvage ? La définition est importante car dans l’une on parle d’une espèce différente du chat que l’on connaît tous. Le chat sauvage européen, felis silvestris silvestris de son petit nom latin, est bien une espèce différente et se trouve être l’ancêtre génétique du felis silvestris catus, notre chat domestique.
Vous pourrez exceptionnellement observer un chat sauvage européen dans nos forêts vosgiennes ou alpines mais de par sa nature extrêmement craintive et discrète, il faut s’armer d’une grande patience et surtout avoir beaucoup de chance. De taille et d’aspect similaire à notre chat classique, il est marron tigré et sa queue est annelée de noir. Oubliez de suite une quelconque aventure avec ce félin qui vit exclusivement en liberté.
Le chat domestique, felis silvestris catus, est une espèce qui comprend les chats de gouttière, les chats errants et les chats de race. La différence de dénomination se situe au niveau du mode de vie et de l’influence directe de l’être humain sur la reproduction. Le chat de race est à la base l’accouplement de deux chats basiques qui ont donné des chatons d’une couleur et d’une morphologie particulières que les Hommes ont gardé, sélectionné et reproduit afin d’en tirer un type reconnaissable et constant. Le chat de gouttière ou encore chat de maison (aussi appelé européen de manière erronée puisqu’il s’agit là d’une race reconnue) est le chat le plus commun de diverses couleurs et zébrures, plus ou moins grand. C’est le minet de monsieur et madame Tout-le-monde et qui n’appartient pas à une race reconnue. Le chat errant, appelé aussi haret et marron en fonction de sa proximité avec l’homme, n’a pas de propriétaire, il vit en groupe près des ressources de nourriture ou en solitaire éloigné des villes. Le point commun de ces derniers est bien d’avoir les mêmes gênes, ils peuvent se reproduire, il n’y a bien que leur mode de vie qui change. Ils sont dits « domestiques », mais leur capacité à vivre captif ou près de l’Homme va différer en fonction de pleins de facteurs.
Celui dont il questionne dans ce sujet est bien le felis silvestris catus vivant en extérieur et qui n’a, à priori, pas de propriétaires. Alors, comment faire si on souhaite intégrer ce minet dans la famille ?
Observation et patience
La première chose à faire pour savoir s’il est envisageable d’adopter ce chat qui vous fait de l’œil c’est de l’observer. Vient-il régulièrement dans votre jardin se reposer ou chasser ? Il peut s’agir d’un chat de passage qui a épuisé momentanément ses ressources de chasse et qui repartira aussi vite que venu. Vient-il vers vous ? Se laisse-t-il caresser ? S’il est impossible pour vous de le toucher ou de l’approcher à moins d’un mètre, même après plusieurs semaines, laissez tomber, ce chat n’est pas fait pour la cohabitation et il sera bien plus heureux ainsi.
Petite astuce : bien qu’il ne soit pas fait pour vivre à vos côtés, il peut rechercher de la chaleur et de la nourriture surtout en hiver. Vous pouvez alors lui aménager dans le fond de votre jardin un carton avec quelques couvertures et une gamelle de croquettes pour pallier aux jours les plus durs. Vous aurez la chance alors de l’observer chasser, se prélasser et faire des cabrioles !
Au contraire, si Monsieur le Chat vient à vous, se frotte dans vos jambes et semble apprécier les caresses, il est probablement habitué à l’humain. Soit parce qu’il a déjà vécu chez des personnes et qu’il s’est retrouvé à la rue (abandon, fugue volontaire, etc.), l’adoption est envisageable. Il faut avant tout vérifier que ce chat n’appartient à personne car il se peut que ses propriétaires le recherchent. Parfois, il sera rendu mais ne voudra pas rester chez ses anciens propriétaires parce qu’il y a eu des changements dans sa maison qui lui sont devenus insupportables : arrivée d'un bébé, adoption d’un autre chat ou d’un chien, etc. Dans ce cas, voyez avec les personnes qui voudront certainement bien vous le laisser plutôt qu’il traîne dans la rue.
Vous pouvez emmener le chat chez le vétérinaire pour vérifier son identification par puce électronique ou par tatouage. Les annonces sur les sites perdu/trouvé peuvent aider à réunir chat et propriétaire. Si le minet ne semble appartenir à personne alors la deuxième étape commence !
Faire les choses en douceur
Il ne s’agira pas d’attraper le chat et de l’enfermer coûte que coûte dans la maison en espérant qu’il s’y habituera : c’est le meilleur moyen de le faire paniquer et lui donner envie de fuir à toutes jambes. Commencer par vous présenter à lui régulièrement en faisant, par exemple, votre jardinage ou étendre votre linge. Les chats sont de grands observateurs et il pourra ainsi vous connaître et prendre confiance. Ensuite, appelez-le en vous accroupissant : ainsi vous paraissez moins impressionnant. Présentez-lui votre main, qu’il la renifle et ne le caressez que s’il semble prêt. La tête ou le cou est à privilégier, le corps et la queue sont souvent moins bien tolérés surtout quand le chat ne vous connaît pas. Répétez l’opération souvent jusqu’à ce que le chat semble venir chercher lui-même les caresses.
En parallèle, proposez-lui la sacro-sainte nourriture (croquettes, pâté, thon, etc.), quand vous le voyez, et rapprochez à chaque fois la gamelle de votre domicile. Evitez le lait qui peut provoquer de fortes diarrhées à cause de la forte concentration en lactose qui est mal digérée par le chat.
Quand le chat semble avoir fait de votre jardin son territoire, laissez une fenêtre ouverte pour qu’il s’invite dans votre intérieur. C’est une étape cruciale que certains passeront aisément et d’autres mettront plus de temps. L’important étant de ne pas refermer la fenêtre dès qu’il aura pénétré, il se sentira piégé et cette perte de confiance, au mieux ralentira les choses, au pire fera fuir définitivement le chat.
Laissez le renifler, déposer ses odeurs en se frottant aux meubles, dormir près de la cheminée ou du radiateur et surtout, le laisser ressortir quand il en aura envie. Au fur et à mesure, il aura totalement confiance dans cette maison et ses habitants si accueillants. La nourriture étant toujours une association positive qui renforce le ressenti, n’hésitez pas à lui proposer quand il est dedans.
Les choses suivront leur cours et très vite, chez vous ça sera chez lui.
Les bases de la cohabitation
En pratique, et ce pour tous les chats, des règles de base sont à respecter pour vivre harmonieusement ensemble. Le chat est un animal territorial qui a besoin de supports adéquats pour déposer ses odeurs.
Pour le marquage urinaire et fécal : une litière avec une bonne couche de substrat dont on enlèvera les excréments une fois par jour maximum ; tous les deux jours étant le mieux pour la très grande majorité des chats, sans couvercle (le chat a besoin d’observer l’environnement à ce moment où il est vulnérable) et surtout sans parfum sera idéale. Pour le marquage par griffades, un ou deux poteau-griffoirs en sisal, voire un arbre à chat éviteront les griffades sur le canapé, les murs ou les meubles. Proposez-lui une gamelle de croquettes à volonté et de l’eau fraîche, le chat se régule très bien tout seul dans la plupart des cas et ceci évitera les frustrations liées à la faim (le chat mange environ une douzaine de petits repas en 24 heures).
Le partage entre l'homme et l'animal - Caresses et écoute
Evitez de le caresser en permanence, ce contact peut être mal toléré par les chats qui n’en ont pas l’habitude. Choisissez également les zones que le chat semble préférer, en général, ce sont la tête et le cou. Si vous l’embêtez à un mauvais moment ou que le chat n’est pas un adepte des caresses, il pourra vous mordiller la main pour vous signifier son inconfort : ne le punissez pas, il a le droit – comme vous – de ne pas apprécier tout ce qu’on lui propose. Apprenez à connaître votre compagnon, ce qu’il apprécie ou non.
D’un point de vue santé, une visite chez le vétérinaire s’impose pour vérifier son état général. Surtout si vous possédez d’autres chats et pour éviter des contaminations. Cette visite doit être faite dans les plu bref délai. Vous pourrez faire vacciner minet pour le protéger dans ses futures ballades. Vous pouvez demander aussi un test sanguin pour vérifier qu’il n’est pas atteint de la Leucose ou qu’il ne souffre pas d’insuffisance rénale ou hépatique. Si tel est le cas et que c’est dépisté avant que les symptômes n’apparaissent, ces maladies se gèrent très bien et le chat peut vivre très longtemps comme tous les autres. Votre vétérinaire vérifiera également sa peau et d’éventuelles signés de dermatoses, les parasites, sa bouche et une éventuelle gingivite ou des abcès… Bref, un vrai suivi médical que minou n’aura peut-être pas eu la chance d’avoir avant.
La castration ou la stérilisation du chat sont primordiales si elles n’ont pas été déjà effectuées, car elles permettront d’éviter les portées non désirées, les fugues, les bagarres mutilantes et les marquages territoriaux intempestifs. Vous soulagerez aussi le chat des tensions liées aux hormones sexuelles du chat non destiné à reproduire.
N’oubliez pas non plus, et c’est extrêmement important, que le chat recueilli a eu l’habitude de la vie en extérieure et de tous les stimuli afférents, il n'est pas donc envisageable de lui interdire dorénavant l’accès à l’extérieur. Si vous ne souhaitez pas faire le portier ou tout simplement parce que vous n’êtes pas chez vous en permanence, pensez au chatière. Il y en a même qui fonctionnent avec la puce électronique de votre animal et ne permet l’entrée et les sorties qu’à celui-ci et aux heures que vous avez choisies.
Et quand on a déjà un animal ?
La plus grosse erreur à commettre quand on met en contact des animaux destinés à cohabiter c’est d’intervenir dans leurs interactions. Le souci réside dans notre anthropomorphisme naturel, dans le réflexe d’imaginer à leur place ce que peuvent et doivent ressentir les chats ou les chiens. Pour rappel, les animaux ressentent des émotions, et leur attribuer des sentiments humains tels que la jalousie ou la vengeance c’est aller trop loin dans les niveaux de conscience que cela requiert : les animaux sont plus simples, dans l’aspect positif que cela comprend. Ainsi, pour eux, il s’agira de s’appréhender, de se renifler pour connaître la carte d’identité de l’autre, de s’apaiser, de s’ajuster et pour ce faire ils n’ont besoin que d’eux-mêmes. Pour un chat, cracher, feuler, faire le gros dos dans un premier temps est tout-à-fait classique, c’est un animal territorial dont on perturbe l’organisation. C’est le temps et en fonction de sa capacité d’adaptation qui l’amènera à aller à l’encontre de l’autre, de le connaître et de partager convenablement l’espace de vie. Entre chat et chien, c’est pareil si ce n’est que le chien est un animal social, et tandis que le chat va naturellement se mettre d’abord en retrait, le chien va chercher à renifler et rencontrer l’autre.
Un nouvel arrivant à la maison - Préparer la venue d'un second chat
C’est là qu’il est important de ne rien faire même si ce que vous voyez semble peu amical, car pour les chats, cette animosité première est normale, mais votre intervention pour disputer et dire « que ce n’est pas bien » d’accueillir le nouveau c’est prendre le risque de créer une association mémorielle négative : « ce chat ou ce chien qui pénètre dans mon territoire est à éviter à tout prix ». En plus de devoir s’adapter à ce nouveau venu, votre chat perçoit qu’en sa présence vous le disputez. Il risque alors de manifester un peu plus d’agressivité et bien souvent c’est à votre désarroi car vous imaginez qu’ils ne s’entendront jamais bien alors vous criez et c’est le cercle vicieux.
Une autre erreur importante est de forcer le contact, en portant le chat par exemple et l’apporter contre son gré à l’autre chat/chien : vous risquez non seulement de vous faire griffer, mais pris au piège de vos bras, le chat se sentira prisonnier et la première impression au contact de l’autre sera très mal perçue. Ainsi, la règle d’or est : ne jamais intervenir dans les interactions animales. Prévoyez plutôt d’aménager l’espace de rencontre en privilégiant les cachettes en hauteur si votre chat veut se soustraire, prévoyez une litière en plus pour ne pas créer de frustration, au moins deux gamelles différentes même si elles sont dans la même pièce. Restez en retrait et soyez le plus neutre possible dans vos attitudes. Faites attention à vos micro-expressions faciales et corporelles, vos animaux savent très bien les décoder. Vous êtes leur être d’attachement et si vous semblez calme, le chat en saura d’autant plus apaisé. Pour les premières nuits, il est judicieux également de ne pas faire dormir le chat et l’autre chat/chien dans la même pièce pour que chacun puisse se reposer des émotions de la journée sans avoir à se méfier de l’autre.
Source : Vox animae
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Juaniitaah G
Marilyne C